Enrichissement du milieu dans le contexte « chien de famille » pour ou contre ?
Depuis maintenant plusieurs années on entend parler de l’enrichissement du milieu. Parfois venté comme la solution à tout problème, ou ce qui sembleraient être des troubles de comportement. Mais sommes-nous vraiment juste dans son emploi ? Pourquoi en sommes-nous arrivé à tant de stratagèmes pour laisser Medor seul à la maison ? Pour que Praline ne détruise pas la porte d’entrée ? Ou encore pour que Simba, 3 mois, ne s’ennuie pas ?
J’exerce le métier d’éducateur canin depuis maintenant plusieurs années. J’ai forcément au cours de ma carrière été confronté et ce qui selon pourrait être un « effet de mode » et je vais m’expliquer sur le sujet en donnant mon ressenti, ce qui n’incrimine en rien quiconque utilise ou est adepte de l’enrichissement du milieu dans son quotidien, ou plutôt celui de son chien.
Remontons il y a maintenant plusieurs années. Regardons et rappelons-nous nos chiens dans notre enfance. Ceux de notre foyer, de nos proches ou ceux de nos grands-parents.
Autrefois les chiens vivaient de manière cohérente et souvent bienveillante une vie de famille on ne peut plus simple. Et par simplicité j’entends : SIMPLICITÉ ! Pas d’énorme couchage à mémoire de forme, pas de jouets, de tas de jouets ne permettant plus de savoir la couleur du carrelage d’une maison, pas non plus de mastication abusive ou encore de tapis de léchage ou de fromage collant placarder sur les murs ou les sols.
Dans mes souvenirs, je n’ai jamais connu et vu de chien plus heureux et bien dans leur tête que ceux des générations précédentes. Un effet sociétaire ? Une réalité sans équivoque de la société de consommation dans laquelle nous évoluons. Peux être.
En effet nos chiens d’autrefois savaient rester seuls plusieurs heures à la maison. Ils étaient souvent amicaux et « polis ». Ils savaient également interagir correctement avec d’autres congénères ou même d’autres espèces. Nous y compris.
Je pense qu’auparavant, nous aimions les chiens pour ce qu’ils étaient. Pas pour ce que nous aimerions qu’ils soient. Je pense aussi que la simplicité du mode de vie dans lesquels nos chiens évolués les rendaient plus posés, plus calme et plus patients.
Revenons-en à « l’enrichissement du milieu »
Recommander à « outrance » à mon goût. Il serait la solution à tout problème. N’est-il pas un moyen de « camoufler » des problématiques rencontres sans pour autant les prendre à bras le corps pour les traiter et les soigner ?
Je dirais même si l’on va plus loin, que l’emploi trop fréquent de certains enrichissements allène une forme importante de dépendance et d’« hyper » stimulation ne permettant pas réellement le repos et ainsi favorisant l’apprentissage.
Mais c’est quoi l’enrichissement du milieu ?
Comme je le dis souvent à mes élèves en formation ou mes clients, lisez ou écouter les mots tels qu’ils sont. Sans aller chercher plus loin.
L’enrichissement du milieu c’est tout un tas, quasi incalculable et parfois innommable de stimulus dans l’environnement dans lequel évolue un individu. Nous mème avons besoin d’enrichir notre environnement.
Pour nos compagnons à 4 pattes, cela va d’une odeur à un goût ou encore une matière en passant par des interactions sociales intra et inter spécifiques … une forme, un point de vue… on pourrait en citer des tas tant la liste est longue.
Alors pourquoi faut-il faire attention à ce que l’on utilise en enrichissement ? Et surtout est-il nécessaire de « donner » ou enrichir ?
Eh bien, selon moi, tout dépend du mode de vie de l’individu. Ou plutôt du binôme « homme
chien ». Il faut prendre en compte les activités déjà proposées à son chien. Faire attention à diversifier ses promenades : c’est une forme d’enrichissement. Lui faire rencontrer correctement de nouveaux individus : c’est une forme d’enrichissement. Voici deux exemples concrets qui ne sont parfois pas ou peu appliquer. Et pourtant ce sont deux facteurs primordiaux à prendre en compte pour harmoniser le quotidien d’un chien.
Il y a quelques années je travaillais dans le milieu équestre. J’ai toujours eux des chiens et ils m’accompagnaient partout. Une fois aux Ecuries ils faisaient leur vie, moi la mienne. Mes chiens restaient toujours proches de moi. Ils s’occupaient en jouant entre eux, en me suivant, en pistant des odeurs dans les paddocks où près des chevaux, ils dormaient ou simplement ils m’attendaient. Durant ces années-là je n’ai jamais songé ou pensé à leur rajouter de quoi enrichir leurs journées, car elles étaient complètes de sens. De retour à la maison ils dormaient, tout comme moi !
Et puis j’ai changé de cap. Des chevaux je suis arrivé dans le monde canin. J’ai toujours des chiens. En revanche je ne peux pas forcément les avoir systématiquement avec moi au travail. Ils doivent donc m’attendre à la maison la plupart du temps. Et cela ne les a jamais dérangés. Pourquoi ? Et bien parce que le reste du temps je continue de les emmener partout avec moi. Je change souvent d’itinéraires de promenade car j’adore moi-même découvrir de nouveaux endroits. Vous voyez de quoi je parle ? N’est-ce pas ? Ce n’est pas un peu barbant de faire plusieurs fois par jour le même trajet ? Barbant peut être pas, si les paysages sont distrayants et agréables à regarder, cependant notre attention diminue forcément au fil du temps. Et bien cela est pareil pour nos chiens.
Alors la balade d’accord, mais un chien ça doit bien mastiquer !
Oui … et non …
Oui les chiens tout comme nous ont besoin de mastiquer. Et cela libère une hormone appeler l’endorphine. C’est pour cela que ça apaise. En revanche la mastication doit être minime et pas « surdosée ». En effet une « hyper stimulation » des muscles masticatoires peut provoquer des contractures, des tensions et des douleurs intenses. Et on le sait tous, là douleurs a un effet néfaste sur nos humeurs. Pareil pour nos chiens. Je donne à mes chiens de la mastication. Cependant cela reste très occasionnel. Et surtout lorsque je lors donne une oreille de cochon, un sabot ou autre : c’est plus par plaisir de leur faire plaisir.
Les tapis de léchage que l’on recommande notamment en apprentissage de manipulation peuvent engendrer d’autre soucis. Prenons un exemple concret : si vous me servez un hamburger succulent et qui me donne très envie alors que vous avez l’intention de me voler mon portefeuille. Je serais tellement obnubilé par mon burger que je ne me rendrais certainement pas compte que vous m’avez dérobé mon portefeuille. En revanche une fois mon burger englouti je vais me rendre compte de la supercherie et, de là, il va en découler un tas d’émotions et de comportements à la fois confus et sûrement intenses. Pareil pour nos chiens.
Alors attention je ne dis pas qu’il ne faut pas utiliser de tapis de léchage. Cependant je ne suis pas sûr que cela règle un problème ou qu’il « apprenne » à un chien le sens concret d’une manipulation. Cela doit faire partie d’un protocole. Parfois on peut en avoir besoin, ou cela peut nous être utile… parfois assument pas.
Ce qui a mon sens est assez flagrant, c’est que force est constater que mal utilisé, les
enrichissements sont un amalgame d’outils, de jouets ou de nourriture qui déclenchent bien souvent des dépendances importantes sur nos chiens.
De plus cela est souvent associé à une habitude qui se rattache à une activité.
La question à se poser serait peut-être : ne devrions pas simplement apprendre à vivre avec nos chiens aujourd’hui ? Et ne devrions-nous pas leur apprendre parfois à ne … Rien faire ?
Florient Delille
Éducateur canin et formateur
Fondateurs de « Les Amicanins » et de l’association Flaïka.